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Erwan Keravec Il nous avait déjà étonné avec la formation Les Niou bardophones, recréant un univers musical bouleversant nos habitudes d’écoute, Erwan Keravec nous revient, en solitaire, avec un nouvel opus Urban Pipes, chez Buda Musique. On aurait pu s’attendre, avec sa cornemuse, à un
solo de piobaireachd,
réutilisant à l’infini les mélodies ancestrales des cultures
traditionnelles celtiques, mais il aurait fallu oublier la créativité et
l’ingéniosité de ce musicien. Son souhait, par une utopie, est de montrer que la cornemuse
est un instrument universel, dont on peut jouer de telle manière que le son
produit ne permet plus l’évocation de son origine culturelle. Cette démarche atypique d’un musicien pourtant traditionnel, membre
d’Occidentale de Fanfare, ayant joué avec Didier
Squiban se rapproche finalement du déconstructionnisme
littéraire cher à Derrida. Utilisant la palette sonore de
l’instrument, son étrange tessiture poussée à l’extrême, innovant dans
le champ sémantique de la musique traditionnelle, Erwan Keravec nous
fait entrer dans sa galaxie musicale où la raison mélodique est à recréer
par l’auditeur. La démarche de l’artiste implique notre oreille,
notre culture musicale, dans la compréhension de cette œuvre, qui
comme avec Les Niou
bardophones s’inspire autant du free jazz que de
l’essence de la musique traditionnelle brute. Ce projet, comme presque chacune de ses créations,
fait franchir un nouveau pas en avant à la musique et à la culture bretonne.
De ces sons bizarres et étranges, si notre oreille ne cherche pas à s’y
heurter, naissent de nouvelles mélodies, donnant à la cornemuse une
dimension qu’on ne lui connaissait pas. Passée la surprise des premières notes, on est séduit par l’originalité
débordante de ce musicien virtuose. Il faut évidement être ouvert à l’expérience,
sortir des clivages et de nos habitudes pour apprécier comme il se doit cette
œuvre particulière et exceptionnelle. Jérémie Pierre JOUAN Sources :
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